"Good Start" ! C'est ce que donne le titre de l'album traduit en
anglais... Et même si ce départ est en réalité un second départ, il
n'en est pas moins excellent. Ágætis Byrjun est une véritable
renaissance musicale après un premier album (Von) à la pochette
magnifique mais se limitant à de l'ambient. Du bon ambient certes mais
par définition frustrant.
Le véritable exploit du groupe est d'avoir réussit à populariser sa
musique sans lui enlever son caractère si particulier. La structure des
chansons est d'emblée très symphonique et donc progressive mais jamais
un groupe, aussi progressif qu'il soit, n'a jamais sonné comme Sigur
Ros. Cette musique semble sortir non pas d'outre tombe mais d'une autre
planète, d'un autre système solaire. Les protagonistes n'en sont
pourtant pas moins terrestres, mais trouvent leur inspiration
principalement dans les énigmatiques paysages islandais.
Malgré le caractère extrêmement déroutant à la première écoute, Ágætis
Byrjun attire et scotche littéralement l'auditeur dans des émotions
fortes contradictoires. Ainsi, un long temps de maturation s'avère
nécessaire pour digérer cette matière musicale mais jamais au grand
jamais le charme ne disparait. Rarement une musique n'aura autant
catalysé l'imagination au point d'en devenir parfois angoissante...
L'adjectif innovant parait bien limité pour qualifier la musique de
Sigur Ros mais c'est pourtant ce qui vient à l'esprit lors de la
comparaison avec ce qui se joue ou qui se vomit actuellement sur Terre.
L'atmosphère y est paradoxalement aérée et aquatique, lourde et
planante, incitant tantôt à l'apragmatisme, tantôt à une expressivité
intense.
Il est vrai que le coup de l'archet sur la guitare, on nous l'a déjà
fait depuis bien longtemps, mais vraiment jamais comme ça. Le
"guitariste" si l'on peut l'appeler ainsi, utilise ce procédé
principalement de manière non soliste. Il crée ainsi ces fameuses
nappes sonores atypiques et envahissantes psychiquement. Bien que cet
album s'écoute volontiers d'une traite, les contrastes sont bels et
bien présents. Certains morceaux sont plus lents que le plus lent des
trip hop, au point d'y renier totalement la section rythmique, tandis
que d'autres dévoilent un véritable groove. Le chant, sans être
systématique apporte aussi son lot d'originalité, tant ses influences
semblent indéfinissables. Contrairement à la logique, ce n'est
d'ailleurs pas de l'islandais mais un néolangage spécialement créé pour
l'occasion...
Et quelle voix...
Voilà donc pour Ágætis Byrjun qui demeure donc bien sur indispensable à
tous tant cette musique y est des plus étranges, indéfinissables et
passionnantes que le monde n'ait jamais créé...
Je voulais garder la découverte de Sigur rôs pour moi et quelques amis
triés sur le volet, tant c'est devenu quelque chose de personnel,
presque intime. Mais maintenant, je pense qu'il est temps de rétablir
une injustice, celle de leur anonymat au niveau de la scène rock?
electro? trip hop? mondiale en tout cas.
C'est une nouvelle définition de la musique, une nouvelle
interprétation des émotions et je peux vous dire qu'il n'existe rien,
dans ce bas monde, de semblable...